Les événements qui s’écoulèrent au temps des Chenu sont demeurés assez incertains. On sait néanmoins que la petite garnison entretenue à Nuits ne resta pas inactive ; plusieurs attaques rapprochées de troupes cantonnées à Noyers, cité proche, furent victorieusement repoussées, laissant sur la façade des traces de tirs d’artillerie encore visibles.
Devenu, en 1667, propriété des Barons de Clugny, apparentés aux Chenu, le château devait rester entre leurs mains jusqu’à la Révolution. De leur passage sont restées plusieurs plaques de cheminée à leurs armes : d’azur à deux clefs antique d’or, adossées et entretenues.
Le plus connu d’entre eux fut Jean, Etienne, Bernard (1729-1776) Conseiller au Parlement, puis Maître des Requêtes avant d’être nommé intendant de Saint-Domingue. Appelé au Contrôle Général des Finances en remplacement de Turgot (1776), il n’eut que le temps de créer la Loterie Royale, ancêtre de notre Loterie Nationale, et la Caisse d’Escompte.
C’est lors de la présence de la famille de Clugny à Nuits que Buffon, originaire de Montbard, fut l’un des hôtes les plus connus du château. Il n’est pas exclu de penser que sur les trente-six volumes de sa monumentale Histoire Naturelle, le naturaliste en écrivit quelque pages sous les frondaisons du parc où demeure encore une table dite « de Buffon » . Avant d’être un des principaux lieutenants de Napoléon, dont les victoires sur les Prussiens et les Autrichiens lui valurent ses titres de Duc d’Auerstaedt et Prince d’Eckmühl, le jeune Louis Nicolas Davout vint, adolescent, de la maison familiale voisine pour y séjourner fréquemment.
Les Clugny étant émigrés, le château fut vendu lors de la Révolution comme bien national, puis acquis au début du XIXéme siècle par la marquise de La Guiche, qui ne le conserva qu’une vingtaine d’années. Pendant cette périodes furent effectuées certaines transformations intérieurs secondaires visant essentiellement à améliorer le bien-être des occupants ; pareillement, on fit dessiner, sous la direction de Châtelain (élève de Bertauld) le parc à l’anglaise qui subsiste encore, de même que certains arbres d’essences variées et fabriques dans l’esprit du jour.
Elle y mourut, en 1822, des suites du feu qui atteignit ses vêtements, puis sa personne, et lui causa des blessures auxquelles elle ne survécut que peu de jours.
Madame la Marquise de la guiche -1783 Peinture a l'huile sur toile, env145x119 cm - Auteur: Élisabeth Vigée Le Brun (1755-1842)
La jeune marquise de La Guiche, qui tient des bleuets d'une main, de l'autre sa cruche, et dont la seule élégance est une écharpe de soie jetée sur le rustique corsage. Le succès d’Élisabeth Vigée Le Brun ne se dément pas. Ses portraits de femmes à la fois ressemblants et flatteurs finissent par lui attirer la sympathie de Marie-Antoinette qui fait d’elle son peintre favori. Les deux femmes sont nées la même année, sont enceintes à la même période et adorent leurs enfants ce qui les rapproche. Le tableau de la marquise de la guiche a sûrement été influencé par le hameau de la reine, construit a partir de 1783, puisqu'elle est représentée en jardinière.
C’est à cette époque que le château devint la propriété de ma famille entre les mains de laquelle il se trouve encore actuellement, c’est à dire depuis un siècle et demi en dépit des occupations successives des armées françaises et allemandes lors des deux conflits mondiaux.
Voici deux cartes postales des Archives départementales de l'Yonne